2C : le rêve américain (2/2)

Après avoir évoqué la saison du team en France avec Florent Peronnet, ce deuxième article est consacré à cette saison si particulière aux Etats-Unis. 

Comment ton équipe s’est retrouvée aux Etats-Unis cette saison ?

“Je rêvais d’aller là-bas depuis plusieurs années. Aux Etats-Unis, le sport mécanique est très en vue et prisé, c’est un sport majeur du pays. L’an passé, j’avais déjà bien avancé avec le promoteur et certains pilotes pour envisager un engagement en 2022. Au départ, j’ai travaillé de mon côté seul pour tenter de concrétiser ce projet. Il fallait notamment étudier et discuter de la BOP (Balance of Performance) pour pouvoir amener notre WRC dans ce championnat. 

On a finalisé tout ça tardivement et on a loupé la première manche du championnat. Dans un premier temps, on louait un atelier mais on a eu l’opportunité d’en acheter un à Indianapolis. C’est un pari sur le long terme pour toute l’équipe. On a été très bien accueilli aux Etats-Unis, il y a une grosse ferveur pour le sport auto, ils sont très curieux. Dans ce championnat, nous sommes opposés à Subaru qui est vraiment une grosse équipe.”

Peux-tu nous donner des détails sur cette fameuse BOP ?

“Elle a été réalisée en concertation avec les acteurs principaux, Subaru et le promoteur. Les discussions ont été très ouvertes afin d’équilibrer les performances de chacun.

Pour notre Hyundai, un lest de 130 kg a été rajouté. On a pu placer des plaques à des endroits stratégiques pour tenter de limiter cet handicap. Ensuite, on a une réduction de puissance d’environ 50 cv à cause de la réduction de la bride de turbo (de 36 mm originalement à 34 mm). Enfin, il a également fallu augmenter le temps de passage des rapports. 

Sur le plan aérodynamique, la catégorie est très ouverte avec la possibilité d’avoir beaucoup d’appendices aéros. Donc on a rien touché sur la voiture qui est déjà très aboutie à ce niveau.

Côté moteur, on partait avec un handicap de puissance, de couple et de vitesse de pointe. La Subaru a un moteur 2,4 L et nous sommes avec un 1,6L sur la Hyundai. Par rapport à la WRC de base, la perte est d’environ 3 à 5 dixièmes au kilomètre. Globalement, c’est un championnat qui mérite d’être développé avec des manches sur tout le pays et des tracés supers.”

Comment s’est déroulé la saison sur le plan des résultats ?

“Pour notre première épreuve, qui était la deuxième du championnat, on a pu s’engager sur le fil à cause de soucis logistiques liés au COVD-19. On a pu quand même faire une petite séance d’essais. Pour nos débuts, on menait de bout en bout avant de taper un cerf dans la dernière spéciale. Ken a pu rejoindre l’arrivée à la 2e place mais il fallait changer la coque. Sur la manche d’après, on est en tête après la première spéciale, mais Ken tape un arbre dans le chrono suivant. Encore un changement de caisse pour nous et un défi logistique en plus pour ramener une autre coque et des pièces avec un timing serré. Il faut savoir qu’il faut en moyenne 3-4 jours de camion pour passer d’une épreuve à une autre.

Après ce début compliqué, on signe deux victoires consécutives et on se replace dans la course au titre. Sur la cinquième manche, deuxième place à l’arrivée, mais une fin litigieuse en étant gêné par la poussière alors que nous étions en tête.

Ensuite, deux nouvelles victoires pour nous. Pour la fin de saison, il fallait gagner et devancer notre adversaire pour remporter le titre. Les conditions étaient exceptionnelles avec l’arrivée de la neige la veille du rallye. Malheureusement, on sort dans une descente de nuit piégeuse alors que nous étions en tête. On loupe le titre pour huit petits points face au Canadien Semenuk.

Nous étions logiquement déçus de louper le titre après cette année pleine de challenges. On espère avoir notre revanche à l’avenir mais la réglementation va évoluer. L’année 2023 sera une saison de transition avec une catégorie actuelle qui sera modifiée et nous ne serons pas autorisés à rouler avec la Hyundai. Le championnat va normalement installer les Rally2 comme la catégorie reine en 2024, à l’image des autres pays.”

Tu as pu travailler avec de nombreux pilotes jusque-là. Comment c’est passé cette saison avec comme Ken Block ?

“C’était rafraîchissant pour tout le monde de travailler avec lui et dans cet environnement. Ce n’est pas un champion du monde bien sûr, mais c’est un très bon pilote honnêtement. Côté pilotage, je lui ai principalement conseillé de garder davantage la voiture en ligne et de mettre un peu moins de latéral, il est plutôt habituer à rouler en glisse !

Niveau agenda, il est vraiment très occupé avec ses gymkhanas notamment, mais parvient quand même a bien bossé entre les épreuves et à être disponible. C’était une saison très intéressante avec lui, c’était une bonne découverte et on espère que l’on retravaillera ensemble à l’avenir.”

Comment était composée ton équipe pour cette saison aux Etats-Unis ?

“Nous étions intégrés au team Hoonigan Racing où la fille et la femme de Ken Block étaient également chacune au volant d’une voiture. Sur la Hyundai de Ken Block, nous étions sept personnes de chez 2C Compétition avec quatre mécaniciens, un ingénieur, un logisticien, moi. Il y avait également un mécanicien de Hoonigan qui a l’habitude de travailler avec Ken.”

Après cette première saison, l’envie de revenir doit être forte ?

“Oui clairement. On a vécu le rêve américain pendant cette saison. De grandes distances entre chaque épreuve, beaucoup de souvenirs. Nous étions déçus de mettre fin à cette année, c’était triste de quitter notre atelier. En moyenne, l’équipe se déplaçait pendant deux semaines sur chaque épreuve. C’est comme si nous avions fait huit manches Outre-mer en championnat du monde des rallyes.”