Un mois après un rallye de Sardaigne frustrant, Adrien Fourmaux s’est parfaitement relancé en Pologne, signant l’un des plus beaux rallyes de sa carrière.
Tout de suite dans le bon temps sur un terrain qu’il découvrait, au contraire de la majorité de ses concurrents, le Français a su conserver un gros rythme jusqu’à l’arrivée pour remonter sur le podium, trois mois après son dernier réalisé au Kenya. Il a en plus réalisé un très bon super-dimanche en étant seulement devancé par Ott Tänak et Kalle Rovanperä.
En plus de réaliser ton 3e podium de la saison, tu n’as jamais été aussi proche des meilleurs sur un week-end complet. Quel est ton sentiment après cette épreuve ?
“C’est vraiment un très bon rallye pour nous. Malheureusement, on a roulé en troisième position sur la route sur la grande majorité du vendredi après l’abandon de Tänak (Adrien devait même partir 5e avant le forfait d’Ogier). Au soir de la première étape, on est à 0,06 s/km du leader, et à la fin du rallye à 0,14 s/km, donc c’est vraiment génial.
C’est clairement l’un de mes plus beaux rallyes. Pour la première fois avec la Rally1, j’ai pu rouler très vite pendant les trois jours sans baisse de forme. Avec cette voiture, et contrairement à la Rally2, c’était jusque-là plus compliqué d’être aussi constant pendant toute la durée d’une épreuve.
En Suède, j’avais bien roulé pendant deux jours avant de soulager le dimanche pour assurer le résultat et éviter de faire une erreur. Au Kenya, c’était plus un rythme conservateur et de l’intelligence de course. Cette fois, j’ai pu attaquer de bout en bout, sans commettre d’erreur ni rencontrer de problème. Ce n’est pas en plus un terrain où l’on m’attendait forcément, donc c’est encore plus satisfaisant.
Il y a donc beaucoup de choses très positives à retenir de ce rallye. La voiture a été performante, l’équipe aussi, et c’est très prometteur pour la suite. Maintenant, il va falloir trouver les derniers dixièmes qui manquent pour espérer faire encore mieux à l’avenir.
Alex a fait encore un super boulot et je ne sais vraiment pas comment les copilotes peuvent annoncer les notes à des vitesses aussi élevées, c’est vraiment incroyable. Ils nous répondent qu’ils ont simplement confiance en nous !
Au championnat, on reprend en plus quelques points à Tänak et Neuville, c’est bien aussi.
C’est un de tes plus beaux rallyes ou le plus beau tout simplement ?
“Par le passé, j’ai aussi réalisé de belles courses en étant proche de la perfection avec la Rally2. Je pense par exemple à l’Europe Centrale de l’an passé. Mais en Pologne ce week-end, c’est vraiment le rallye le plus abouti de ma carrière et le plus beau sur le papier.”
Le seul point négatif de ton rallye est peut-être cette baisse de rythme le samedi après-midi où tu perds le contact avec le trio de tête.
“Oui, c’est vrai. On a perdu une vingtaine de secondes en seulement trois spéciales. On a manqué de performances sur les deuxièmes passages plus défoncés avec des ornières. Il n’y avait pas de rails comme ça en séances d’essais et on a pris un peu de temps à trouver des solutions. En plus, le choix de pneus n’était pas idéal et il aurait fallu prendre un ou deux pneus durs. L’usure des pneus n’était pas trop importante, mais les pneus ont surchauffé et ils bougeaient beaucoup sur les derniers kilomètres.
Par le passé en Pologne, les pilotes avaient pris des pneus durs dans les deuxièmes boucles. Mais à l’époque, les pneus durs de chez Michelin étaient plus tendres que les durs de Pirelli d’aujourd’hui. Et il fallait aussi prendre en compte que les voitures sont un peu plus agressives qu’avant. Au final, on a perdu un peu de temps à cause de ce choix, mais la différence n’était pas énorme.
Après, dans la Power Stage, on a manqué aussi d’un peu de performances car la voiture était trop basse et on perdait du temps en “tapant le sol”.
Tes essais avant la Pologne étaient plutôt adaptés aux autres rallyes à venir en Lettonie et en Finlande. Tu t’attends à être encore mieux ensuite ?
“Oui, c’est l’objectif. On va repartir sur les mêmes bases de réglages pour le prochain rallye. Je n’ai pas encore regardé si le shakedown serait représentatif du rallye en Lettonie. On va garder des réglages importants comme la garde au sol et les géométries. Et grâce à l’expérience des deuxièmes passages en Pologne, on sera normalement mieux dans des conditions plus dégradées. Je ne veux pas trop parler de nos améliorations, mais ce sont des petites choses qui nous permettent de mieux “protéger” la voiture, tout en étant plus efficace. C’est un bon compromis à trouver.
Du côté des pneus, on va essayer d’avoir des informations un peu plus précises car on ne s’attendait pas à que la route soit si abrasive l’après-midi. On va voir avec les hommes météos s’ils ne peuvent pas faire davantage attention à ça.”
Comment expliques-tu ce gain de performances depuis le début d’année ?
“On peut simplement voir que le développement de voiture marche bien et va dans le bon sens. En Pologne, c’est la première fois que l’on utilisait le nouvel aileron sur un rallye rapide et c’est pour moi une grosse progression. Pareil pour les géométries et les amortisseurs qui ont évolué depuis quelques mois. On va avoir une évolution pour la Lettonie dont je ne peux malheureusement pas encore parler. Et ce n’est pas fini !”
As-tu déjà démarré ta préparation pour la Lettonie ?
“J’avais une journée de repos aujourd’hui et j’attaque les vidéos demain. Alex vient de m’envoyer les indications, comme à chaque rallye. Je vais regarder des vidéos pendant 2h à 3h tous les jours. Demain, j’ai aussi mon débriefing habituel avec l’équipe à faire après chaque épreuve.”
Que penses-tu de la performance de Mārtiņš Sesks avec une Puma sans hybride ?
“Mārtiņš a grandi sur des routes avec un profil assez similaire et a toujours été très performant sur les rallyes rapides. Il avait déjà roulé deux fois ici et avait gagné l’an passé. C’est un pilote qui a commencé à rouler dès l’âge de 16 ans et n’a jamais arrêté depuis alors qu’il a 24 ans. En plus, il avait la meilleure position sur la route le vendredi. Donc je m’attendais à qu’il soit très rapide, je ne suis pas surpris. Et il faut aussi ajouter qu’il est plus facile de rouler avec une voiture sans l’hybride.
En Lettonie, il va normalement être encore plus rapide s’il s’adapte bien à l’hybride. Il n’a pas loupé une seule édition de ce rallye depuis 2015 et a gagné les deux dernières années. En partant derrière, il jouera forcément devant dans deux semaines. J’espère me bagarrer pour les premières places avec lui.”
Et quel ton avis sur la victoire de Kalle Rovanperä malgré son absence de préparation ?
“Un peu comme pour Sesks, ce n’est pas vraiment surprenant. Le timing pour les reconnaissances était assez tranquille pour nous, et il n’y avait pas grand chose à faire le jeudi entre le shakedown et la super-spéciale. Donc il y avait clairement du temps pour bien travailler, même avec un jour de moins. En plus, les journées se terminaient assez tôt, contrairement à la Sardaigne par exemple, donc il était possible de retravailler pas mal le soir.
En plus, c’est un gars qui est quand même double champion du monde, qui connaît très bien sa voiture, et qui partait d’assez loin sur la route.”
Une superbe interview qu’on aimerait voir plus souvent.
Merci RS.
Adrien qui analyse la belle performance de Sesks pour JMB17 et d’autres qui me sont tombés dessus pendant le rallye (clin d’œil)…
Énormes perf et résultat pour Adrien et Alex.
Un Grand Bravo.
Comme d’habitude, ces interview-là sont passionnantes! Merci.
un truc étonnant, c’est le réglage pour la Power stage… Testoni Le team manager de Pirelli sur le WRC avait fait exactement ce commentaire sur la Power stage en Sardaigne : selon lui, la Puma était trop molle et touchait dessous.
Adrien le dit aussi mais avec un rallye de retard.
Par contre, tous les détails sur les pneus et le temps pour les notes (en référence à Rovanperä par exemple) sont passionnants.
C’est riche, merci RS et bravo Adrien!