Bien installée dans le paysage du rallye français depuis près de 30 ans, Chazel Technologie, entreprise de location et de préparation en sport automobile, traverse évidemment une période très particulière.
Alors que la reprise de l’activité est espérée pour cet été, Renaut Chazel, le dirigeant de cette entreprise gardoise, nous a donné son sentiment sur la période actuelle, tant pour sa société que pour le rallye en général.
Comment est l’activité actuelle de l’entreprise ?
“Je travaille dans l’atelier tout seul et mon fils Louis quant à lui travaille à distance. J’avais un mois 1/2 de travail devant moi. J’avais une remise en état de « collection » complète d’une Peugeot 207 S2000 à faire pour un client de la Guadeloupe. Cela m’a rappelé mes débuts où j’étais tout seul à travailler sur une voiture.
J’ai également de la mécanique à faire sur des voitures qui m’appartiennent.
Mes 10 salariés sont au chômage partiel depuis le 17 mars. Cette décision est à la fois économique mais aussi familiale pour protéger les personnes à risque dans mon entourage. Au début, on prenait ça un peu à la légère comme tout le monde, mais c’est vite devenu sérieux.
On a quand même la chance d’être en France. Nous avons été remboursés des salaires 8 jours après nos versements, et chapeau au gouvernement.”
Et économiquement, quel est l’impact pour une entreprise comme la tienne ?
“Chazel a été créé il y a 27 ans et nous avons les reins solides, je ne suis pas inquiet. Nous n’avons pas de loyer à payer donc tout va bien, ce sont les charges fixes qui font mal dans cette période.
Et nous avons toujours payé nos fournisseurs en temps et en heure, toutes nos relations sont bonnes et nous n’avons pas à nous inquiéter de ça non plus.
Du côté des clients que j’ai au téléphone, 20% seulement semblent touchés par la crise. J’ai une dizaine de clients qui attendent impatiemment que cela reparte.”
Comment vois-tu la suite de la saison rallystique en France ?
“Après l’annulation du Rouergue pour des raisons économiques, le championnat a pris forcément un sacré coup. Je suis toujours positif et j’espère vraiment que tout va reprendre au Mont-Blanc avec l’espoir que la maladie va se réguler.
Il y a des petits rallyes en danger. Les ASA ont peur de ne pas obtenir les autorisations suffisantes. Prévu fin juin, le rallye du Gard espère toujours par exemple, il y a en gros 50% de chances qu’il se déroule. Il y a trois conditions pour qu’un rallye ait lieu : l’homologation à la préfecture, l’apport du budget de sponsors privés, et la présence de concurrents en nombre. Je parle encore de ma région car je connais mieux évidemment mais le rallye de Bagnols-les-Bains, prévu mi-juillet, essaye aussi de maintenir son épreuve.
Je m’inquiète surtout pour les organisateurs de rallye qui seront en manque de ressources et partenaires. Pour limiter le problème économique, je pense qu’il serait judicieux de supprimer les remises de prix, cela représenterait en gros le budget amené par des sponsors locaux. On retrouve déjà ce format sur quelques rallyes en France et dans les territoires d’Outre-Mer.
Enfin, je trouve ça bien que la finale ait été retirée car la qualification n’aurait ressemblait à rien alors que tous les concurrents attendaient mars pour marquer des points.
Plus les épreuves seront grosses, moins il y aura de concurrents selon moi.
Je pense que le championnat de France Terre sera le plus touché avec seulement trois épreuves au programme, en espérant que le Castine trouve une place. C’est dommage pour beaucoup de monde, surtout que sur des épreuves comme les Cardabelles, il pourrait y avoir une énorme liste d’attente.”
Vous allez engager de nombreux nouvelles voitures cette saison, sont-elles prêtes ?
“2020 est l’année de la nouveauté ! On attend cette année l’arrivée dans notre atelier de plusieurs voitures Françaises : Alpine A110 RGT, Peugeot 208 Rally4 et Renault Clio Rally5.
Pour l’Alpine, la voiture est en construction. Certaines pièces produites à l’étranger sont manquantes, de ce fait la voiture sera disponible une fois que tout sera reparti. Chez Renault, personne n’a répondu pendant trois semaines car l’usine était fermée et nous n’avons eu aucune information pour nous prévenir. Ils viennent de ré-ouvrir ce lundi. Et pour Peugeot, nous n’avons aucun délai mais nous avions pu commander avant fermeture en étant prévenu.”
Renault travaille pour une modification du calendrier et des débuts pendant l’été. Qu’en penses-tu ?
“Les concurrents ont tous le budget de côté. Au plus tôt ça peut partir, mieux ce sera. Le but est d’arriver à faire un championnat avec assez de courses pour qu’il soit cohérent. Et donc s’il faut rouler sur des épreuves du championnat de France 2e division, pourquoi pas.”
Cette saison 2020 promettait d’être très belle pour ton équipe.
“Oui on a 30 voitures prêtes et 27 doivent courir cette saison (rallye et circuit combinés). On avait un carnet de commandes de 40 rallyes et maintenant on espère en faire une quinzaine. Beaucoup de clients sont devenus des amis et seront toujours là après cette période. On a une bonne clientèle autour de nous.
En championnat de Belgique, on a deux voitures toujours prévues : la C3 R5 et l’Alpine. En Suisse, deux nouvelles Clio pour le trophée national, plus l’Alpine pour le rallye du Valais. En France, trois voitures seront engagées pour Dylan Gagnière, Ange-Marie Damerval et un troisième pilote à annoncer prochainement.
Avec la 208, des rallyes au coup par coup, comme sur le championnat de France asphalte globalement.
Et en circuit, un nouveau calendrier est sorti en début de semaine, la saison commencera mi-juillet.”
As-tu reçu des demandes pour la fin de saison ?
“Depuis une semaine, ça a accéléré fort pour des demandes d’informations, des devis sur des rallyes comme le Cigalois, la Montagne Noire, les Cévennes et toute la France. On a énormément de demandes pour les Cévennes comme toujours. L’édition 2019 avait été une très grande réussite et on espère faire aussi bien cette année.”
Es-tu inquiet globalement pour cette fin de saison 2020 en rallye et même plus ?
“Je ne suis pas inquiet en ce qui concerne le nombre de participants et leurs moyens pour rouler. Le sport auto français et européen vont bien se porter. Je suis plus inquiet pour le WRC et des voyages vers des pays lointains qui me semblent irréalistes pour la fin d’année.
Il ne faut pas que les concurrents se privent de se rapprocher des ASA pour confirmer qu’ils seront présents et toujours partants pour rouler. Les ASA ont peur de ne plus avoir de pilotes et ils ont besoin de soutien.”
Courage c’est bientôt la fin !
Renaut Chazel est patron d’une grosse structure et il est réjouissant de constater qu’il envisage le futur à l’identique de Bernard Piallat, le boss de PH Sport. Ces deux patrons très expérimentés sont résolument optimistes, tant mieux!