Le week-end dernier au rallye du Var, Yoann Bonato, en compagnie de Benjamin Boulloud, a décroché un quatrième titre de champion de France Asphalte des rallyes, après ceux déjà acquis en 2017, 2018 et 2020.
Pour sa dernière chronique de la saison, le pilote des 2 Alpes revient évidemment sur ce titre, mais plus globalement sur cette grosse saison 2021 avec un double programme composé également du championnat ERC. Alors en route vers l’Italie avec Benjamin Boulloud à ses côtés, Yoann nous a répondu pour une interview un peu particulière où les deux hommes se sont exprimés.
Bonjour Yoann et Benjamin. Comment ça va après ce rallye du Var et surtout ce nouveau titre de champion de France ?
Yoann : “Ça va bien, nous sommes en route pour faire une journée d’essais avec Michelin en vue d’améliorer la gamme. Je ne sais pas encore avec quelle voiture on va rouler. Hier après-midi et hier soir, on a bien pu profiter avec l’équipe en participant notamment à la soirée Peugeot Sport pour la fin d’année en formule de promotion. On vient tout de même de vivre une sacrée saison avec l’équipe CHL avec un super travail, et il fallait fêter ça.”
Benjamin : “On peut simplement regretter d’avoir eu peu d’endroits possibles pour fêter ça hier soir, même si les circonstances actuelles n’aident pas évidemment. En ERC, ils ont mis en place quelque chose de sympa avec le départ d’Eurosport de l’ERC mais je sais qu’il a toujours une sorte de fête organisée en fin de saison.”
Comment s’est passé ce rallye du Var ?
Yoann : “Les conditions étaient très difficiles. Ce n’est pas le plus facile de rouler sur un sol séchant. On a jamais été sûrs de faire le bon choix de pneus. On voulait avant tout ne pas sortir pour ne pas gâcher la fête, donc on avait vraiment à coeur de terminer le rallye. Quand Quentin a abandonné, on a réussi à se lâcher un peu plus, mais quand les conditions sont difficiles comme ça, la prise de risques paie tout de suite et on a pas été capables de suivre le rythme de Nicolas Ciamin.”
En quoi ce 4e titre est différent des autres ?
Yoann : “Il est vraiment différent car il se jouait sur la dernière épreuve de la saison. C’était très disputé, et même si nous avons gagné 5 victoires cette saison, aucune n’aura été facile à aller chercher. Ce 4e titre a aussi une saveur particulière car c’est le record en France (à égalité avec Bernard Béguin). Jamais je n’aurais pu imaginer ça au début de notre carrière. On ne court pas pour les records, mais ça reste sympa, c’est historique.”
Benjamin : “Cela peut paraître bête mais quand la fédération à communiquer sur les cinq titres à jouer dont celui de copilote, cela m’a fait quelque chose, même si je le savais et que je suis habitué maintenant. En remportant le titre une 4e fois, j’ai l’impression d’avoir laissé une trace dans ce championnat. Cette année, il n’y a pas eu une seule course facile, cela a toujours été disputé ! Quand Quentin (Giordano) était devant, et même si nous étions bien placés pour le titre, c’était chaud car nous n’avions pas le droit à l’erreur, c’était un sentiment un peu étrange.”
Est-ce difficile de se remotiver chaque année quand on enfile les titres comme ça ?
Yoann : “Nous sommes toujours prêts pour ce championnat, et nous ne sommes pas malheureux en France ! La fédération a fait beaucoup d’efforts pour médiatiser le championnat. Il y a aussi des sites internets et des réseaux sociaux qui permettent de suivre tout ça. Il y a une belle émulation dans ce championnat, et c’est devenu un peu notre vitrine finalement avec beaucoup de partenaires qui veulent notre présence sur ces épreuves. Grâce à notre programme en France, on a eu des opportunités pour rouler ailleurs, comme en ERC.”
Benjamin : “Je parle d’un autre sujet, mais en ayant gagné 5 courses sur 8, il aura fallu malgré tout attendre le dernier rallye pour être titré. On pouvait perdre ce championnat et la distribution des points est un peu à la gestion selon moi. Il faudrait peut-être se caler sur l’ERC avec des points par journée ou encore ajouter une Power Stage (en projet pour le championnat de France). Sportivement, la Power Stage, c’est vraiment super fort, c’est comme faire un all-in au poker et je trouve ça intéressant.”
Yoann : “Pour les points, je pense que c’est une bonne chose d’avoir un joker en fin de saison, même si tu ne sais jamais ce que ça va vraiment donner avant la fin d’année. On l’utilise tous pour un abandon finalement.”
Quelles sont les tendances pour votre programme en 2022 ?
“Rien n’est encore validé, on a un peu de retard sur la visibilité pour l’année prochaine car la saison s’est terminée plus tard qu’en 2020. Mais pour la France, ça se présente bien. De toute façon, on pourrait avoir trois scénarios possibles, faire l’ERC plus quelques manches en France, faire la France avec quelques manches de l’ERC ou faire les deux comme cette année.”
Et un engagement au Monte- Carlo ?
“C’est un peu tôt pour en parler, je ne sais pas. Je ne peux pas garantir à 100% que nous n’y serons pas. Cela entame une bonne partie du budget, soit environ 2 manches ERC pour faire cette “seule” épreuve.”
Depuis ton retour au copilotage en 2016, quels ont été les gros changements techniques pour toi Benjamin ?
“Il y a beaucoup plus de numérique qu’avant bien sûr. L’ancienne génération travaillait avec des cartes et c’est maintenant devenu obsolète. La jeune génération utilise beaucoup le numérique et fait son suivi détaillé avec la géolocalisation en plus du road-book. Il y a aussi différentes applications et notamment celle pour les pneumatiques Michelin. Si le smartphone tombe en panne, on est un peu embêté maintenant !
Je n’ai pas franchi le pas du Notebook numérique, je préfère le papier. Je sais par exemple que Yannick Roche (copilote actuel de Nicolas Ciamin) utilise ce sytème depuis quelques années.
Peut-être que j’essaierai. J’aurais pu essayer pour les essais cette semaine d’ailleurs (Yoann : Je ne suis pas très chaud pour ça !). J’ai eu une expérience de rallye-raid avec ce système et c’était assez compliqué. Je ne me vois pas utiliser cet outil en rallye avec des fréquences de mouvements et d’indications beaucoup plus élevés qu’en rallye-raid.”
En tant que copilote, est-ce que l’on arrive à progresser et toujours apprendre de nouvelles choses ?
“En ERC, tout est un peu plus compliqué et il y a toujours moyen de progresser avec chaque course. Au cours de la saison, je n’ai jamais été rassasié au niveau de mon travail et au niveau du sport.
Je tiens à souligner que nous avons vraiment beaucoup de copilotes français avec un bon niveau en France ! La Filière FFSA marche bien avec une belle formation. J’adore transmettre aux jeunes et j’apprends aussi grâce à eux. J’ai eu la chance d’avoir Jean-Paul Chiaroni pour me guider à mes débuts et le travail réalisé par la FFSA est vraiment très bon actuellement.”
Nous terminons exceptionnellement cette chronique par une interview croisée entre Yoann et Benjamin.
Quel a été ton moment le plus décevant de cette saison 2021 ?
Yoann : “Le rallye de Rome en ERC. Je n’ai pas réussi à être dans le coup, alors que j’attendais ce rallye avec impatience. C’est un peu ma contre-performance de l’année.”
Benjamin : “Les Canaries, ma déception de la saison. Je voulais qu’on sorte la tête de l’eau après une saison difficile. Je ne parle pas que de la sortie, mais on aurait globalement aimé faire mieux au niveau des chronos. On a pas réussi à être techniquement au point.”
Quelle a été la spéciale la plus sympa ?
Yoann : “Les spéciales du dimanche au Portugal. C’était vraiment magnifique, ce n’était pas du tout cassant avec la bonne largeur de route, c’était incroyable !”
Benjamin : “Même chose que Yoann, c’était vraiment une matinée très belle.”
Quel a été le moment le plus satisfaisant ?
Yoann : “Les Açores car nous étions dans le coup pour le podium sur la terre. C’est la première fois où l’on était bien sur cette surface. C’était une belle satisfaction personnelle.”
Benjamin : “L’Antibes même si ça peut paraître bizarre. On termine 3e mais on arrivait sur un cycle de cinq rallyes consécutifs. On a eu des problèmes en reconnaissances avec la voiture, donc c’était déjà délicat. C’est un rallye toujours complexe et on a réussi à faire jeu égal avec Camilli le deuxième jour sur son terrain. C’était une vraie satisfaction, on a fait un rallye super solide malgré une fatigue nerveuse avant cette course.”
Yoann : “J’ai pensé à Antibes également !”
Une petite anecdote ou du moins un moment marquant peut-être ?
Benjamin : “Croiser une ambulance en Hongrie. Nous étions à bloc dans cette spéciale hyper rapide et tu te demandes d’un coup où tu es. Yoann dit “Qu’est-ce qu’il se passe ? C’est une blague”. J’ai répété au moins 4 fois la note car Yoann avait ralenti alors que le virage devait arriver très vite normalement ! Donc tu restes derrière l’ambulance et t’attends en te disant, c’est quoi cette mascarade.
Yoann : “La panne de l’Antibes en reconnaissances ! Juste après notre panne, deux routiers s’arrêtent et appellent un copain mécano. Peu de temps après, il arrive avec une voiture de prêt, ce qui nous a permis de bien finir les reconnaissances. On a perdu une demi-heure sur la journée. C’était improbable.”
Et enfin, une petite question “hors” rallye. Est-ce que cet agenda ultra chargé n’a pas été trop compliqué pour votre vie familiale en dehors des rallyes ?
Yoann : “C’était difficile de ne pas rentrer à la maison parfois. Là encore, je ne suis pas rentré depuis les Canaries et on va enchaîner avec les essais Michelin puis les essais Citroën. Je savais que ce serait compliqué mais c’est notre choix de toute façon.”
Benjamin : “Entre la récupération entre les courses et la préparation, ce n’était pas évident. C’était toujours de plus en plus dur pour préparer les courses et tu as tendance un peu à courir après le temps parfois. Familialement, il n’y a plus beaucoup de place et ton environnement le subit.
Mais j’avais besoin de ce gros programme avec l’ERC pour me sortir de la routine de France, donc aucun problème !”
À la suite de cette conversation entre les deux hommes, Yoann nous a renouvelé son envie de poursuivre cette chronique pour la saison prochaine.
Une vrai …Bonato Meeke
(Comme dirait Kris)
super felicitation a l’équipage, en esperant les revoir l’année prochaine (ainsi que la chronique)